Les emblèmes des pays britanniques

Rose, trèfle, chardon, poireau… Avez-vous remarqué que les symboles héraldiques des pays britanniques ont quelque chose de bucolique ? Pourtant, l’origine de ces emblèmes nationaux, dans l’ensemble, est loin d’être aussi charmante et champêtre qu’il n’y paraît aujourd’hui, même s’ils ont gagné leurs lettres de noblesse sur des champs… de bataille !

Des champs de guerre aux terrains de sport, on retrouve d’ailleurs ces emblèmes sur le maillot des XV de ces quatre pays.

Question épineuse, des chardons comme armes de défense ?

Le chardon est la fleur nationale de l’Écosse. Ce symbole a été choisi en mémoire de la résistance des Écossais aux assauts des envahisseurs vikings durant le Moyen-Âge. La fin des raids est marquée par la défaite du roi Håkon IV de Norvège par les troupes royales d’Alexandre III d’Écosse à la bataille de Largs, le 2 octobre 1263.

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La légende dit que les Vikings, tentant une attaque nocturne pour prendre les Écossais par surprise, avaient retiré leurs bottes afin d’approcher une citadelle sans faire de bruit. Malheureusement pour eux, ils se seraient retrouvés dans un champ de chardons, comme il en existe tant en Écosse, et ne purent retenir leurs cris de douleurs, éveillant l’attention des sentinelles qui purent donner l’alerte, permettant au reste des troupes d’organiser la défense et de repousser l’ennemi.

Cette victoire a inspiré la création de l’ordre de chevalerie du Chardon (Order of the Thistle), institué par le roi d’Angleterre et d’Écosse Jacques VII.

Un poireau au cœur de batailles épiques ?

La première légende établissant un lien historique entre poireau (leek en anglais) et pays de Galles daterait du VIe siècle. David de Ménevie (Dewi Sant), saint patron des Gallois, conseilla aux combattants d’arborer ce légume pour se distinguer de leurs ennemis à une époque où les uniformes n’existaient pas. Ce stratagème permit de remporter la bataille et le poireau fut adopté comme emblème.

On raconte encore que c’est lors de la bataille d’Azincourt, le 25 octobre 1415, pendant la guerre de Cent Ans, que les Gallois l’auraient accroché à leur casque pour être distingués des Français par les Anglais.

Cependant, aucune source historique ne mentionne cette anecdote. Il est même à parier que si poireaux il y eut, les archers anglais et gallois les auraient plutôt mangés, tant ils étaient affamés. Et d’ailleurs, ils ne portaient pas vraiment de casques.

Alors ? Le vert et le blanc étaient certes les couleurs de l’uniforme de la famille des Tudor, à la fin du XVe siècle. Les Gallois présents à ces batailles portaient des habits similaires. Au XIIIe siècle, les princes de Gwynedd, au nord du pays de Galles, habillaient leurs courtisans et soldats en vert et blanc. Mais si les poireaux ont les mêmes couleurs, ils ne sont mentionnés comme symbole gallois qu’à la fin du XVIe siècle

À noter : les emblèmes de Saint David sont le poireau (cenhinen) et la jonquille (cenhinen Bedr, littéralement poireau de Pierre), deux termes quasiment homophones en gallois. On pourrait raisonnablement penser que cette origine confuse est le fruit (sans mauvais jeu de mots) d’une mauvaise traduction, mais la jonquille comme emblème a été adoptée bien plus tard… Bref, la légende reste entière.

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En rouge et blanc, the Wars of the Roses

Quelle que soit sa couleur, le symbole de l’Angleterre est la rose depuis plusieurs siècles, depuis les guerres des Roses (1455-1485), qui ont opposé la maison de Lancastre (en rouge) à celle d’York (en blanc).

La rose reste présente même au terme de trente ans de guerres civiles, lors de la bataille de Bosworth, le 22 août 1485, qui marque la fin du régime yorkist, avec la mort du roi Richard III, battu par Henry Tudor, héritier des Lancastre. Ce dernier accède alors au trône, sous le nom d’Henri VII. À cette occasion, il décide de conserver la rose comme emblème du pays, mais réunit les deux roses en une : une rose rouge avec un milieu blanc. Henry VII l’utilise aussi quand il épouse Elizabeth of York. Elle est d’ailleurs appelée aujourd’hui la « rose Tudor ».

On est loin du langage des fleurs, où la rose rouge symbolise la passion intense et la rose blanche l’amour pur et sincère…

Et le trèfle dans tout ça ?

En réalité, il s’agirait d’une feuille d’oxalis petite oseille (Oxalis acetosella), et non d’une feuille de trèfle (Trifolium repens). Le trèfle a des feuilles arrondies alors que celles de l’oxalis sont en forme de cœur.

Mais au fait, comment dit-on trèfle en anglais ?
Non, on ne dit pas trifle !

Pour désigner un – vrai – trèfle (à trois ou quatre feuilles), l’usage de (three-leaf or four-leafclover est quasi-systématique dans la langue vernaculaire.
Pour parler du trèfle irlandais, dans le sens du symbole de l’Irlande, on utilisera le terme shamrock, dérivé du gaélique irlandais seamróg, diminutif de seamair (« trèfle »). C’est même une marque déposée par le gouvernement irlandais.

Source Wikimedia

Si vous avez la main verte, trefoil est le terme botanique plus précis, tiré de l’ancien français trefoil, lui-même du latin trifolium (« trèfle »). On l’utilise aussi en héraldique (hors Irlande, attention 😉)

En revanche, si vous avez la main heureuse au poker, avec une quinte flush royale en trèfle, vous éviterez l’incompréhension en parlant de club royal flush.
Mais pourquoi désigne-t-on le trèfle des cartes à jouer par le terme bâton en anglais ? C’est une autre histoire…